Le 22 novembre 1978, Michel Sardou touche en plein cœur avec « Je vole », un titre d’apparence douce sur l’émancipation, qui dissimule en réalité un drame intime : le suicide d’un adolescent. Un succès bouleversant, vendu à 500 000 exemplaires.
Nous sommes le 22 novembre 1978. Un titre, sorti un mois plus tôt, devient numéro 1 des ventes contre toute attente. Une chanson dramatique, encore incomprise, va toucher le public en plein cœur. Les premières phrases donnent le ton, on est loin, très loin des bals populaires...
Quand on écoute les paroles, on y voit l’histoire d’un adolescent qui fugue loin du cocon familial et s'émancipe… Mais la vérité, qui sera révélée bien plus tard, est tout autre.
Parue sur l'album "Je vole", dont elle est le deuxième single, la chanson est écrite par Pierre Billon (le fils de Patachou) et Michel Sardou lui-même.
Pierre et Michel se connaissent depuis l'enfance. Ils travailleront ensemble sur une trentaine de chansons, dont celle-ci, qui présente une particularité étonnante, vu la puissance de la voix de Sardou : les couplets sont parlés. Le refrain, lui, est chanté.
Quand j'étais petit, je rêvais de vivre en Amérique. Alors, quand j'en avais l'occasion, seul face à mes turpitudes, je plaçais le 33 tours sur la chaîne hi-fi du salon et j'écoutais Sardou raconter :
Ne pas se retourner S'éloigner un peu plus Il y a gare, une autre gare Et enfin l'Atlantique
Et j'ai cru, moi aussi, que cet enfant-là s'en allait simplement vers son propre destin. Sauf que, en vérité, la chanson raconte le suicide d'un enfant. Un événement tragique vécu par Sardou lui-même, quelques années plus tôt. En écrivant "Je vole", il choisit de dresser le portrait d’un jeune en souffrance qui décide de quitter ce monde. Et, pour mieux préserver la sensibilité du public, Sardou ne nomme pas frontalement l’acte fatal. Voilà pourquoi autant de confusion aura régné autour de la vérité.
Et pourtant, Sardou dit ceci :
"C'est bizarre cette cage Qui me bloque la poitrine Je ne peux plus respirer”
Aurait-on peut-être dû écouter la version anglaise, "Last Flight", sortie l'année suivante, en 1979, pour tout comprendre ?
Cette sombre mélodie n'empêche pas le titre de s’arracher en 45 tours. Tous les pays francophones succombent en 1978. 500 mille exemplaires seront vendus en quelques semaines, c'est colossal. Surtout pour un titre qui parle à la première personne, en plein milieu de l'hiver, d’un drame. Alors oui, comme pour "l'été de porcelaine", le 22 novembre 1978 restera comme le Happy Day où Michel Sardou a su, habilement, garder secrète la véritable histoire d'une chanson pour lui permettre d'appartenir à chacun et, peut-être aussi, de lui échapper...
Le podcast Happy Days vous replonge dans les années 60 et 70, revisitant la folie musicale, les icônes comme Johnny, Brel ou les Beatles, et les grands événements culturels et scientifiques de l'époque. Chaque épisode propose un voyage nostalgique à travers les souvenirs marquants de ces 2 décennies