En juillet 1962, le bar « Le Clapotis » devient le repaire festif de La Panne. Entre flirts, twist, parties de poker et jukebox, jeunes Belges et Français vibrent sous l’œil attentif du légendaire barman Robert. Un été effervescent raconté par Jean Jième Valmont, témoin privilégié.
Nous sommes en juillet 1962. Happy pour la petite commune de la Panne. L'un de ses bars va connaître la gloire cet été. Il s'appelle "Le Clapotis".
Dans ses mémoires, Jean Jième Valmont (qui vient d'avoir dix-neuf ans et fera bientôt les beaux jours du rock belge) se souvient d'avoir débarqué avec une voiture sur la carrosserie de laquelle il a écrit : "Twist. Danger. Nouvelle Vague".
Jean Jième raconte : “J'adorais La Panne. L'ambiance était chaude et conviviale. Les jeunes débarquaient en masse du Nord de la France. Les bistrots étaient toujours bondés.” D’ailleurs, comme ils carburaient tous avec un juke-box, toute la journée on se laissait bercer par les flopées de chansons romantiques comme : “Belles, belles, belles" et, bien entendu, "Oh Lady" !
C'est l'été, c'est parti pour la drague, au bout de la digue, dans ce petit établissement qui draine la jeunesse de La Panne. Particularité : c'est bondé jour et nuit, mais attention, il n'est pas permis de danser la journée.
La nouvelle vague s'y retrouve, ils et elles sont serrés comme des sardines. Un épais nuage de tabac s'y est installé, dans son décor de filets de pêche et de bouées marines.
Au Clapotis, Il y a ceux qui osent flirter le temps d'une journée. Le lendemain, ils passent à une autre. Au Clapotis se jouent également d'interminables parties de poker très viriles, non loin du juke-box, qui diffuse Richard Anthony ad nauseam...
Pour Jean Jième, UN personnage se démarque, c'est Robert, le barman du Clapotis.
Il écrit : "avec ses énormes poches sous les yeux, c'était vraiment un sacré personnage. La voix éraillée par la cigarette, Robert carburait du matin à la nuit tombante, se frayant tant bien que mal un passage entre le bar, la salle et la terrasse. Il était capable de porter à bout de bras une vingtaine de boissons par plateau."
Certes, à la Panne, c'est la cohue permanente, mais Robert a l'oeil, il repère ceux qui arrivent et personne ne repart sans payer.
"Si on voulait avoir la paix", explique Jean Jième, "on avait intérêt à garder sa bouteille le plus longtemps possible. Car s'il vous surprenait les mains vides, Robert savait se montrer intraitable ; il vous obligeait à commander une nouvelle boisson."
Prix ce l'époque : 20 francs belges, c'était déjà une petite somme, surtout pour la jeunesse. Surtout qu'il faut encore quelques pièces pour le juke-box, où cartonne cet été un certain Dick Rivers...
Le Clapotis est une institution, et ça fait les affaires de notre bon vieux Robert, dont les poches de l'uniforme blanc sont tellement bourrées de pièces de cinq francs qu'elles étaient, selon Jean Jième, en permanence sur le point de rendre l'âme.
Robert ne dort presque jamais, il mange à peine. Comment tient-il ? Les pourboires ! Ses deux mois de saison au Clapotis lui rapportent assez pour vivre toute l'année. Alors il donne un maximum.
En attendant, pas question de se reposer, car oui, c'est l'été 1962 à la côte belge, et le Twist n'a qu'à bien se tenir, la Nouvelle Vague s'y est déjà donné rendez-vous l'été prochain... notamment un groupe, "Jième et les enfants terribles", dont les enregistrements ont disparu, peut-être emportés par la marée...
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